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L'Argentine: du maté et de la pampa

L’Argentine est un grand pays d’Amérique du Sud, qui se situe à l’extrémité sud du continent. Elle est entourée par le Chili à l’est, la Bolivie et le Paraguay au nord et le Brésil et l’Uruguay à l’est. Le pays est également à la confluence des océans Atlantique et Pacifique, en plus de s’étendre jusqu’en Antarctique. L’Argentine, c’est également le point le plus haut d’Amérique (avec l’Aconcagua à 6960 m) et le plus bas (lagune del Carbone, -105m). Terre du tango et du maté, les Argentins produisent également de l’excellent vin et une viande de qualité. L’Argentine se démarque des autres pays d’Amérique latine que nous avons traversés par sa population davantage d’ascendance européenne. Il y a également des communautés indigènes, mais moins qu’au Pérou ou en Bolivie par exemple.


16 septembre 2015, toujours accompagné de mes joyeux compagnons, Jérémy et Clément, nous entrons en Argentine par la Quiaca, en provenance de la Bolivie. Nous sommes en forme, nous avons passé une excellente nuit chez Marcia, qui nous a chaleureusement accueillis chez elle. Comme à chaque fois, nous avons hâte de franchir la frontière et de découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture. Or, dès que nous franchissons de l’autre côté, nous avons une mauvaise surprise ; nous ne pouvons pas changer notre monnaie bolivienne (Boliviano) pour des Pesos argentins. Nous devons donc retraverser en Bolivie pour trouver un bureau de change. C’est alors que nous avons une heureuse surprise : le taux de change est ici à 2.27 (pesos pour 1 boliviano) au lieu du taux officiel à 1.35. Nous recevons donc beaucoup plus d’argent que prévu. Cette particularité de l’Argentine est due au fait qu’il existe une différence entre le taux de change en vigueur à l’intérieur du pays (qui est le taux officiel) et sa valeur sur le marché international. Il est ainsi plus avantageux d’acheter des pesos argentins à l’extérieur de l’Argentine. De plus, concernant ce même sujet, il existe en Argentine un marché noir des dollars américains. Par exemple, lorsque nous y étions (je crois que ce n’est plus le cas avec le nouveau gouvernement Macri) 1 $ US valait 15 pesos sur le marché noir alors que le taux de change officiel était à 1 pour 9.


Revenons-en à l’aventure. Nous sommes ici encore sur un haut plateau andin désertique à 3500 m d’altitude (prolongement de l’Altiplano bolivien). Il fait froid la nuit et le soleil brûle la peau le jour. Nous avons hâte de redescendre en altitude afin de changer de ce rude climat. En effet, nous n’avons pas redescendu des montagnes (ou dû moins très peu) depuis le nord du Pérou, cela fait plus de deux mois.


Un intermède dans l’arrière-pays argentin


Le 17 septembre, à Humahuaca, Clément et moi partons de notre côté pour explorer un peu l’arrière-pays argentin. Au programme : un chemin de terre accidenté, isolé dans les montagnes, qui ne mène nulle part. Nous désirons partir du plateau à 3500 m où nous nous trouvons, traverser la chaîne de montagnes à l'est pour redescendre dans le climat chaud subtropical du Nord-est argentin. Le hic est que le chemin s'arrête dans les montagnes, ne se rendant pas jusqu'à la jungle tout en bas. Néanmoins, il existe un sentier de mule qu'empruntent les locaux (surtout des indigènes dans le nord de l'Argentine) qui relient la fin de la voie au premier village plus à l'est, d'où commence une autre piste. Nous n'avons que des cartes approximatives des villages sur la route et aucune idée du dénivelé qui nous attend. Le soir, à la station de pompiers, nous planifions le tout. Il ne reste plus qu'à acheter les vivres (qui sont beaucoup plus chers qu'en Bolivie) et nous sommes prêts à partir.

La première journée, nous croisons quelques villages minuscules où nous nous arrêtons pour recueillir de l'information. Cela monte beaucoup plus que nous pensions, avec des passages très accidentés. Nous nous arrêtons dans la communauté de Palca de Aparzo, où nous trouvons refuge dans la demeure d'un humble vieillard. La deuxième journée, nous n'en finissons pas de monter/descendre, nous ne croisons aucune demeure et seulement un véhicule. Nous sommes perdus au milieu des hauts sommets argentins, avec des vigognes comme seule compagnie. À midi, nous nous arrêtons pour manger notre pain de viande avec un grand pain rond traditionnel. Nous sommes à la fois épuisés par l'effort, inquiets de ne pas savoir si nous atteindrons le prochain village d'ici la nuit et heureux d'admirer la nature sauvage qui nous entoure. Nous arriverons finalement à Santa Ana et, non sans difficulté, on nous ouvrira un local de l'église pour passer la nuit. Le 3e jour, c'est la meilleure partie. Nous entamons notre descente des montagnes. Tôt le matin, à près de 4000 m d'altitude, nous avons une incroyable vue qui porte à l'infini. Nous sommes passés de l'autre côté des massifs, alors tout ce qui reste devant nous, sont les basses terres tout en bas, plus rien ne s'élève. Nous nous faufilons ensuite dans le minuscule sentier escarpé qui zigzague à flanc de falaise. Rouler sur le vélo est à ce moment pratiquement impossible et très dangereux. Un mauvais mouvement et c'est la grande chute. Rapidement, nous descendons dans la forêt (absente en haute altitude), où le climat est chaud et agréable. Après plus de 8 km, nous rejoignons la communauté de Valle Colorado, qui est le retour à un chemin de terre. Nous roulons quelques kilomètres de plus pour se retrouver à Valle Grande, à regarder un match de la coupe du monde de Rugby (Clément en est un passionné). Poursuivant notre route, c'est dans une petite ferme que nous campons la nuit tombée. Luis, qui sera notre hôte, nous raconte sa vie en mâchant une boule de feuille de coca. Enfin, nous poussons sur les pédales jusqu'à El Libertador le lendemain, qui est la petite ville où Jérémy nous attendait.


Nous retrouvons Wolfy, notre cher compagnon cycliste allemand

À El Libertador, il fait chaud, très chaud, en plus d'être humide. Nous avons l'impression d'être de retour en Amérique centrale, il ne manque que les noix de coco. Notre prochain objectif est d'atteindre Cafayate, plus à l'ouest. De là, nous suivrons la fameuse route 40, qui est un peu comme la version argentine de la Highway 66 américaine. Cette voie traverse le pays du nord au sud (ce qui n'est pas une légère affaire, considérant la longitude de l'Argentine), en reliant toutes les provinces longeant les Andes entre elles. De nombreux Argentins et Sud-Américains en général la parcourent, que ce soit en véhicule, en vélo, à chemin ou encore à pied. Pour notre part, nous la suivrons jusqu'à la frontière de Futaleufu (d'où nous traverserons au Chili), 2 600 kms au sud de Cafayate.


La route jusqu'à Cafayate n'est pas incroyable. Il y a, au départ, beaucoup de trafic, c'est plat, pas grand-chose à voir. Par contre, le climat chaleureux nous comble de bonheur. La vie est agréable et les gens accueillants. Nous partageons régulièrement un maté, cette célèbre herbe infusée énergisante qui est au cœur de la vie sociale des Argentins et dont les gens par ici abusent à longueur de journée. Boire le maté, c'est une façon de créer des liens avec les gens ou de passer un bon moment avec de vieux copains. Ainsi, malgré l'amertume de cette boisson, c'est avec grand plaisir que nous en échangeons une tasse avec autrui. De plus, nous roulons ici entre 500 et 1000 m. Les hautes montagnes, c'est officiellement terminé; nous resterons en dessous des 3000 m pour le reste du périple.


Nous suivons la 34 puis la 9 pour nous rendre à Général Guëmes. De là, nous bifurquons plus au sud par les petites routes 47 et 48. Paisibles et suivant une rivière, nous avons bien apprécié cet intermède. Ensuite, nous empruntons la 68 qui mène à Cafayate. Cette portion de chemin passe au travers de fabuleux canyons. Cafayate est un village touristique, capitale argentine du vin blanc. Nous ne nous sommes pas arrêtés longtemps, le temps de faire le plein de bouffe et c'est parti. Fait intéressant, nous avons dormi pour la première fois dans un gymnase municipal là, ce qui deviendra une tradition en Argentine.


En sortant de Cafayate, maintenant sur la route 40, nous apercevons un cycliste au loin. En le rattrapant, nous réalisons que c'est Wolfy, notre ami avec qui nous avons partagé la route du sud de la Colombie jusqu’au nord du Pérou. Tous les 4 de nouveau réunis, nous festoyons le soir même à Santa Maria.


Des plaines arides et du vent



À Belen, petit village sympathique du Nord argentin, nous nous arrêtons chez Antonio pour 2 jours. Deux jeunes bénévoles aident Antonio dans sa boutique alternative et nous y passons un agréable séjour… De Belen jusqu'à ce que nous atteignons la région des 7 lacs, près de Bariloche, nous traversons de grandes plaines désertiques dominées par un vent puissant. Les journées sont longues et les divertissements rares. Peu de plantes, des villages dispersés, un bitume qui s'étire à n'en plus finir... ajoutez à cela de la pluie froide qui vous fouette le visage et nous voilà comblés! Au milieu de cette étendue de rien, nous sommes parfois obligés de monter les tentes parmi des roches, du sable et des bourrasques. L'eau peut poser problème aussi, il est difficile d'en trouver. Aussi, si nous voulons nous arrêter, les tunnels sous la route sont les seuls endroits qui offrent un abri confortable pour dîner par exemple, à l'abri du vent et du soleil. Ces conduits de cours d'eau asséchés deviennent donc rapidement nos meilleurs amis, accueillant nombre de nos fameuses «pauses galettes» (une grosse portion de biscuit pour chacun) ou nos repas sandwich pâté de viande, fromage crémeux et carotte. Par contre, nous sommes ravis par les rencontres que nous faisons. À San Juan, nous restons avec la famille d'un cycliste que nous avons croisé. La famille de Matias nous accueille comme des rois. Nous somme les invités d'honneur et on prend à cœur notre confort, bien que nous ne soyons que 4 cyclistes étrangers et sales de surcroît. Tant de commodité est si agréable et je me délecte du seul fait de me réveiller dans un lit et de prendre une douche chaude. C'est également là que nous avons une expérience concrète des particularités de la vie argentine; on soupe à minuit, on boit du vin réfrigéré, on se gave de Dulce de leche et on se défoule sur les politiciens corrompus qui ont mené le pays à la ruine. Bref, autant de petits plaisirs pour nous. Il y a également à Mendoza, où nous passerons de bons moments avec Juan, grand amateur de cycliste qui se fera un devoir de nous aider dans notre traversée.


Près de Mendoza, il y a les plus hauts sommets des Andes et par conséquent d'Amérique. Le mont Aconcagua, à 6960 m, est un monstre que j'aurais bien aimé admirer de plus près. Malheureusement, nous sommes un peu tôt dans la saison (début du printemps) et la plupart des passages sont fermés à cause de la neige. La seule voie qui est ouverte est dominée par le transit de véhicule. Nous avons des amis cyclistes qui sont passés par cette route et qui ne le recommandaient pas. Nous nous contentons de le contempler de loin.


700 kms plus au sud, nous nous arrêtons un soir dans l'école primaire de Ranquil Norte, un minuscule village. On nous héberge et se réjouit de notre présence. Nous partageons les repas avec les élèves et les étudiants. Nous finirons par rester une journée entière en compagnie de cette petite communauté. Il faut préciser qu'en Argentine, à cause de son énorme territoire très peu peuplé, il existe des écoles spéciales pour les habitants des régions éloignées. Ces écoles rurales accueillent tous les enfants d'un vaste secteur. Ils y ont leur enseignement, sont logés et nourris durant 2 semaines, avant d'être renvoyés chez leurs parents pour une même période. Le fait est que ce sont souvent des enfants de famille indigènes défavorisées, qui manquent de ressources pour subvenir à leurs besoins. Ainsi, que leurs enfants soient alimentés gratuitement est un grand incitatif à les envoyer à l'école. Nous sommes vraiment reconnaissants de l'accueil que nous avons reçu des élèves comme des enseignants.


La route des 7 lacs

La route des 7 lacs traverse une région d'Argentine verdoyante, où de nombreuses rivières descendent des montagnes pour se jeter dans des lacs, dont sept principaux que cette piste relie entre eux. La nature y est dense et riche, ce qui est un réel contraste avec les plaines arides à perte de vue que nous contemplons depuis un mois déjà. En plus, des montagnes enneigées dominent les paysages. Le 29 octobre, nous atteignons Junin de los Andes après une journée de 122 km avec vent de face. C'est le début de cette zone de fraîche végétation. Il suffit de traverser une rivière et voilà, vous avez totalement changé de décor. Cela fait du bien de revenir dans les montagnes.


Le lendemain soir, nous nous arrêtons dans une fermette pour camper. La famille occupant les lieux n'hésite pas à nous accueillir et à veiller à ce que nous ne manquions de rien. C’est fou la gentillesse de ces gens de la campagne, pour qui nous sommes de parfaits étrangers. Au matin, nous nous levons à 4h afin de prendre la route à 6h. Le froid est insoutenable, nous avons les mains complètement gelées. Lors de ces circonstances, nous roulons avec tout notre linge sur le dos en attendant impatiemment la chaleur des premiers rayons de soleil. Par contre, le spectacle est hallucinant; le reflet des montagnes sur l’eau limpide des lacs est fabuleux.


Nous roulons ainsi jusqu’à Bariloche, la plus grande ville de cette région. Nous restons à la maison de Miguel, paradis des cyclistes. De plus, c’est là que nous nous séparons de notre compagnon Wolfy. Il doit prendre le bus jusqu’à Buenos Aires où son vol de retour l’attend. Wolfy, bon vivant allemand ayant toujours le mot pour rire, j’espère bien le revoir un jour…


Le 5 novembre, il ne nous reste plus que 4 jours en Argentine. Nous descendons plus au sud jusqu’à la frontière de Futaleufu, à 380 km de Bariloche. Nous repassons ainsi par la Pampa, que nous serons bien heureux de quitter une fois au Chili. Par la suite, nous suivrons la Carretera austral au Chili avant de revenir en Argentine pour nous rendre jusqu’en Terre-de-Feu, maintenant l’objectif ultime de l’aventure.


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